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Gallimard
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Libres d'obéir ; le management, du nazisme à aujourd'hui
Johann Chapoutot
- Gallimard
- Nrf Essais
- 9 Janvier 2020
- 9782072789243
Reinhard Hohn (1904-2000) est l'archétype de l'intellectuel technocrate au service du III? Reich. Juriste, il se distingue par la radicalité de ses réflexions sur la progressive disparition de l'État au profit de la «communauté» définie par la race et son «espace vital». Brillant fonctionnaire de la SS - il termine la guerre comme Oberführer (général) -, il nourrit la réflexion nazie sur l'adaptation des institutions au Grand Reich à venir - quelles structures et quelles réformes ? Revenu à la vie civile, il crée bientôt à Bad Harzburg un institut de formation au management qui accueille au fil des décennies l'élite économique et patronale de la République fédérale : quelque 600 000 cadres issus des principales sociétés allemandes, sans compter 100 000 inscrits en formation à distance, y ont appris, grâce à ses séminaires et à ses nombreux manuels à succès, la gestion des hommes. Ou plus exactement l'organisation hiérarchique du travail par définition d'objectifs, le producteur, pour y parvenir, demeurant libre de choisir les moyens à appliquer. Ce qui fut très exactement la politique du Reich pour se réarmer, affamer les populations slaves des territoires de l'Est, exterminer les Juifs. Passé les années 1980, d'autres modèles prendront la relève (le japonais, par exemple, moins hiérarchisé). Mais le nazisme aura été un grand moment managérial et une des matrices du management moderne.
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Du temps acheté ; la crise sans cesse ajournée du capitalisme démocratique
Wolfgang Streeck
- Gallimard
- Nrf Essais
- 9 Octobre 2014
- 9782070143597
Sociologue de l'économie, Wolfgang Streeck analyse la crise financière et fiscale de 2008 non pas comme un événement singulier, mais comme une séquence de l'évolution du capitalisme depuis 1945. Plus particulièrement de ce que l'auteur appelle le «capitalisme démocratique» - ce régime économique qui, jusqu'aux années 1970, achetait l'adhésion des populations occidentales grâce à la promesse d'un constant progrès de leur condition sociale et par les possibilités d'emprunt et de crédit. Il fallait gagner du temps sur la crise éventuellement à venir. Dès les années 1980, suite à la résistance à l'impôt des producteurs de richesses financières et à leur lutte pour les allègements fiscaux, un nouveau régime se met en place, marqué par l'inflation et les déficits budgétaires nationaux. Le financement de la dette publique passe à des institutions privées qui exigent en retour la consolidation par la dérégulation des marchés financiers, puis la compensation de leur faillite par les États. Plus que jamais, l'économie ne relève pas d'une gestion technicienne, mais d'une instabilité constante dans les rapports de force entre producteurs de biens et producteurs de profits:aujourd'hui les marchés entendent s'internationaliser sans plus rencontrer d'obstacles politiques du fait des Parlements nationaux ni de leur législation. La globalisation est un leurre qui masque la réalité:à l'État fiscal classique a succédé dans les années 1970 l'État débiteur, qui entendit, par les emprunts publics et les crédits privés, désamorcer les antagonismes sociaux et maintenir une forme de croissance. Aujourd'hui, nous vivons dans l'État de consolidation - celui qui fait payer aux citoyens le service de la dette par des réformes de structure visant à se délester de ses fonctions régaliennes et de certaines missions de service public au profit d'institutions hors de portée des représentations démocratiques nationales:l'euro et la Banque centrale européenne en sont deux exemples avérés.
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Libre-échange mondialisé, développement des nouvelles technologies financières ou culturelles, juridictions nationales contre Cour européenne, mais aussi recours d'ouvriers licenciés contre des plans sociaux, action collectives d'actionnaires ou procès d'irradiés pour mise en danger de la vie d'autrui : il n'est de jour où l'on n'assiste pas, sous nos yeux, aux mutations contemporaines du droit. Or la situation du droit est des plus paradoxales. Le droit est avant tout une pratique qui vise à ordonner les rapports sociaux et les échanges économiques. Mais sa particularité, son exceptionnalité, son importance pour le fonctionnement des sociétés et pour la compréhension de leur fonctionnement conduisent trop souvent encore la Faculté à enseigner le droit comme un savoir strictement clos sur lui-même, qui se construit théoriquement, toute fenêtre fermée, en s'interrogeant seul sur sa propre rationalité, ses fondements, ses évolutions. Le droit serait, en surplomb des sociétés, une norme . Or tous les jours, mobilisé au coeur de la société, pour faire avancer des revendications ou atténuer des obstacles à la libre circulation des biens, le droit est une source , dont s'inspire, par exemple, citoyens ou lobbies pour faire triompher leurs causes. En ce sens, dans ses enseignements universitaires comme dans ses pratiques professionnelles, il ne peut échapper à la question : à quoi aujourd'hui sert le droit ? Qui se sert désormais du droit ?
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L'homme économique ; essai sur les racines du néolibéralisme
Christian Laval
- Gallimard
- Tel
- 7 Septembre 2017
- 9782072739248
Le néolibéralisme entend triompher partout dans le monde comme la norme unique d'existence des êtres et des biens.
Il n'est pourtant que la pointe émergée d'une conception anthropologique globale qu'au fil des siècles l'Occident a élaborée. Celle-ci pose que l'univers social est régi par la préférence que chacun s'accorde à lui-même, par l'intérêt qui l'anime à entretenir les relations avec autrui, voire l'utilité qu'il représente pour tous. La définition de l'homme comme «machine à calculer» s'étend bien au-delà de la sphère étroite de l'économie, elle fonde une conception complète, cohérente, de l'homme intéressé, ambitionnant même un temps de régir jusqu'aux formes correctes de la pensée, à l'expression juste du langage, à l'épanouissement droit des corps.
Cette anthropologie utilitariste, fondement spécifique de la morale et de la politique en Occident, fait retour avec le néolibéralisme contemporain sous des formes nouvelles.
En retraçant, dans un vaste tableau d'histoire et de philosophie, les racines du néolibéralisme, Christian Laval donne à voir la forme, le contenu, la nature de la normativité occidentale moderne telle qu'elle s'affirme aujourd'hui dans sa prétention à être la seule vérité sociale, à se poser en seule réalité possible.
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Le théâtre juridique ; une histoire de la construction du droit
Jacques Krynen
- Gallimard
- Bibliotheque Des Histoires
- 1 Novembre 2018
- 9782072805080
Au XX? siècle le droit semble avoir tout colonisé. On trouve du droit partout, du droit pour tous, du droit pour tout. Certains observateurs dénoncent l'inefficace et suffocante portée d'un tel phénomène, d'autres en éclairent les formes et les causes immédiates. Différent est l'objet de ce livre:considérant le natif et continuel besoin de droit de l'Occident, il s'attache à sa construction depuis l'Antiquité, met ainsi en vaste perspective son emballement contemporain. Sont retracés la tâche et le fonctionnement séculaires de chacune des trois forces créatrices de la normativité juridique:la science du droit, la législation, la juris-diction. Est également résumée l'histoire longue de leur action conjuguée puisque, depuis la naissance médiévale des États, aucune de ces forces n'a pu s'affirmer sans les autres. Elles ont joué ensemble et c'est dans l'interdépendance qu'elles élaborent encore, à l'échelle européenne et internationale, ces normes innombrables venant supplanter les droits nationaux. Le savant, la loi, le juge. Quels que soient l'époque ou le régime, cette bâtisseuse triade n'oeuvre cependant pas régulièrement dans l'harmonie. Au travers d'un moment ou d'un acteur de la construction du droit en France, Jacques Krynen met en relief la rivalité chronique marquant les relations entre la législation issue du politique, et la juris-diction issue des tribunaux. Cette rivalité peut être source de fortes tensions et nuit au caractère obligatoire du droit. La scène du théâtre juridique, jamais assujettie à de précises partitions, fera toujours place aux libres montages, aux débordements et improvisations.
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La science de la richesse ; essai sur la construction de la pensée économique
Jacques Mistral
- Gallimard
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 31 Janvier 2019
- 9782070177844
Le langage de l'économie est devenu la lingua franca de notre époque. Sans son concours, le monde actuel serait aussi inintelligible que le serait l'univers sans la physique newtonienne. Ce livre expose d'abord comment a germé l'idée audacieuse d'une «science de la richesse» et déploie, en explorant ses lignes de faille, la généalogie intellectuelle d'une discipline qui a donné corps à cette ambition. Mais l'histoire de la pensée économique n'est pas qu'une curiosité intellectuelle. Elle est depuis quatre siècles étroitement associée à la philosophie politique:Montchrestien, Smith, Marx, Walras, Keynes ou Friedman ont, au même titre que Hobbes, Montesquieu, Rousseau, Tocqueville, Rawls ou Hayek, accompagné les bouleversements des Temps modernes et c'est conjointement qu'ils donnent sens à la formation progressive, depuis quatre siècles, d'une société d'individus, à la fois agents économiques et sujets politiques. Il y a toujours eu une tension entre les sphères économique et politique mais l'ère néolibérale, dont nous vivons aujourd'hui le délitement, pousse cette tension à son paroxysme. Ce livre iconoclaste décrypte de manière novatrice les paradoxes et les dilemmes de l'individualisme contemporain. Face au désarroi que révèle la montée des populismes, la tâche du XXI? siècle consiste à renouveler le pari keynésien et à surmonter le divorce actuel entre lucidité économique et volonté politique.
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La culture de la croissance ; les origines de l'économie moderne
Joêl Mokyr
- Gallimard
- Bibliotheque Des Histoires
- 27 Février 2020
- 9782072740435
On a beaucoup écrit sur la Révolution industrielle, ses lieux et ses étapes. Ce livre-ci prend le problème tout autrement. Il développe les conditions culturelles de cette révolution technologique et sociale. L'auteur, Joel Mokyr, professeur à Princeton et économiste parmi les nobélisables, est en même temps un historien de l'économie dont la réputation est internationale.
Pourquoi la Révolution industrielle a-t-elle eu lieu en Europe et pas en Chine ou au Moyen Orient dont les conditions intellectuelles et sociales pouvaient faire des régions à prétention industrielle ?
Pour l'auteur, le mérite de l'Europe n'est pas dans l'économie de marché ni dans l'innovation technologique mais dans une culture de la croissance qui s'enracine dans deux raisons, d'une part la fragmentation des États et des rivalités internationales et d'autre part, une République des sciences parallèle et intérieure à la République des Lettres. Les vraies raisons du développement européen tiennent à une forme de libéralisme qui fermente de 1500 à 1700 et s'épanouit avec les Lumières.
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L'esprit démocratique des lois
Dominique Schnapper
- Gallimard
- Nrf Essais
- 13 Février 2014
- 9782070143627
Il y a un malaise dans la démocratie. Jamais cependant les sociétés n'ont été aussi libres, aussi tolérantes et aussi riches, n'ont assuré plus de libertés, plus de bien-être matériel à leurs membres et n'ont été moins inégalitaires.
Dominique Schnapper, poursuivant sa réflexion sur la dynamique démocratique et ses vertus dont nous profitons sans en prendre toujours conscience tant elles nous paraissent naturelles, analyse ici ses dévoiements possibles, susceptibles de remettre en question les grands principes qui la fondent - des dévoiements portés par l'ambition de dépasser toutes les limites, nés de l'intérieur de la vie sociale et dans son prolongement. Il suffirait de donner à chaque principe son sens plein, en allant au bout de sa logique, jusqu'à l'excès qui risque de le déformer.
La démocratie ne peut que se trahir elle-même, incapable d'être à la hauteur de ses ambitions. Il importe donc de saisir le moment où cet écart entre les aspirations des individus et la réalité des pratiques sociales finirait par remettre en question le sens même de l'ordre démocratique. Ainsi, la forme moderne de l'hubris ne serait-elle pas le rêve d'échapper aux contraintes biologiques et sociales de la condition humaine, nourri par les avancées remarquables de la science et par la puissance de l'aspiration démocratique?
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Histoire économique ; esquisse d'une histoire universelle de l'économie et de la société
Max Weber
- Gallimard
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 3 Janvier 1992
- 9782070724888
Issue de conférences données par Max Weber peu avant sa mort, l'Histoire économique, que la présentation de Philippe Raynaud situe vigoureusement, occupe une place particulière dans l'oeuvre du grand sociologue comme dans la pensée économique.Moins systématique qu'Économie et société, riche en aperçus originaux et en intuitions profondes, cet ouvrage éclaire en effet d'un jour nouveau les problèmes que Weber n'a pas cessé de méditer:celui, épistémologique, de la possibilité d'une compréhension de l'histoire comme celui, plus proprement historique, de la particularité du développement «capitaliste» de l'Occident.Dans sa peinture de la formation du capitalisme, Weber emprunte plus d'un trait à l'oeuvre de Marx:comme chez l'auteur du Capital, le capitalisme apparaît comme le fruit du plein développement de la production marchande, il présuppose la séparation des travailleurs et des moyens de production et il est à l'origine d'une augmentation importante de la productivité du travail; Weber reste cependant étranger à la perspective socialiste, car le marché est pour lui une forme généralement plus efficace que la direction centralisée.Weber se situe donc en dehors de l'opposition entre les libéraux et leurs critiques socialistes:l'économie moderne est le fruit d'une histoire violente et partiellement contingente, mais il n'y a pas pour autant d'au-delà économique du capitalisme, car celui-ci incarne au plus haut point la dimension économique de la rationalisation sociale.
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Un jour, une crise, grave, brutale, dévasta l'économie mondiale : les usines fermèrent, le chômage explosa, les maisons furent hypothéquées, leurs habitants jetés sur les routes et les banques cessèrent de prêter à ceux qui en avaient le plus besoin. On parla alors de dépasser le marché, de moraliser l'économie libérale, d'inventer un avenir humaniste alternatif. On parla même d'un retour du marxisme. Enfin Keynes parut et l'économie mixte dont il s'institua le théoricien insuffla une deuxième vie au système capitaliste, démentant du même coup les prédictions de Marx. Mais ce système n'était-il pas appelé à se heurter de nouveau, un autre jour, à des limites historiques ? A cette question essentielle, Paul Mattick (Berlin 1904 - Boston 1981), militant et théoricien de la gauche allemande révolutionnaire et antistalinienne, refusant la dictature du parti centralisé au profit de l'auto-organisation ouvrière à travers des conseils élus, a consacré cet ouvrage qui traite de problèmes fondamentaux - l'accumulation du capital, la monnaie, l'automation, le sous-développement, le capitalisme d'Etat, etc. De la confrontation entre Keynes et Marx, il conclut que nombre d'analyses de ce dernier ont encore partie liée avec l'avenir, notre avenir.
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Voici quelque temps déjà que l'on assiste à une redécouverte du droit. Après le pouvoir, la loi. Après la ressaisie du politique comme phénomène « autonome et spécifique », on en est venu, sur la même lancée, à reprendre le juridique comme phénomène sui generis, irréductible à tout autre. Ce que s'efforce justement d'établir cette Esquisse d'une phénoménologie du droit. En fait d'« esquisse », c'est le champ entier du droit que le livre embrasse, dans le souci de lui assigner un fondement rigoureux à partir duquel en reconstruire l'histoire. Il y a droit, établit d'abord Kojève, lorsque intervient un point de vue tiers dans les affaires humaines. Mais le moment fort de sa démarche, c'est la reconstruction de l'apparition du droit au sein de la lutte du maître et de l'esclave, l'« acte anthropogène » par excellence. De par ses conditions d'engendrement, le droit se divise logiquement et historiquement en deux : un droit de l'inégalité (droit aristocratique), un droit de l'égalité (droit bourgeois), dont la synthèse sera le droit absolu ou droit du citoyen. Ainsi la réflexion de Kojève a-t-elle accompagné et continue-t-elle de nourrir le travail intellectuel d'avant-garde, jusqu'en ses renouvellements les plus frappants, jusqu'en sa réappropriation d'un objet longtemps méconnu ou répudié.
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Penser la loi ; essai sur le législateur des temps modernes
Denis Baranger
- Gallimard
- L'esprit De La Cite
- 25 Janvier 2018
- 9782070783403
Nos démocraties font des lois en abondance. Mais à force de légiférer, la raison d'être des lois a fini par nous échapper : souvent, elles répondent à nos attentes immédiates plutôt que de se mettre au service du bien commun. Pourquoi cette inadéquation des lois à l'esprit des lois? Il faut remonter aux grands penseurs de la politique moderne, Montesquieu ou Rousseau, pour le comprendre. Ils ont placé la loi au coeur de l'action politique : se gouverner soi-même c'est avant tout légiférer. Mais ils n'ont pas livré le mode d'emploi de cet acte fondamental. D'autres ont tenté, avec plus ou moins de succès, d'armer la loi d'un discours de la méthode.
Ce livre reconstitue l'histoire de cette ambition prométhéenne : penser le travail du législateur à la fois comme oeuvre de la raison et comme activité empirique. Il revisite la loi des temps anciens et sa métamorphose, à l'épreuve de notre modernité politique, en une multiplicité de législations : autrefois le Prince faisait loi, aujourd'hui chaque législation nouvelle s'incorpore dans tout un système.
Nous ne pouvons nier notre dette envers les fondateurs d'une science de la législation, écrit Denis Baranger. Il reste que notre usage de la loi doit autant sinon plus aux praticiens du droit - magistrats, avocats, jurisconsultes - qui sont les porteurs d'un savoir bâti au fil d'une expérience indéfiniment remise sur le métier.
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L'Etat inachevé ; la question du droit dans les pays arabes
Ali Mezghani
- Gallimard
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 6 Octobre 2011
- 9782070134335
Le rapport au droit est le grand impensé des sociétés arabo-musulmanes.
Non qu'elles ignorent le droit, bien au contraire : ce sont les sociétés les plus juridicisées qui soient. Mais celui qu'elles respectent n'est en rien une instance autonome, séparée et distincte d'autres instances : il n'est perçu qu'à travers la religion, sous la forme de la charia, réceptacle de la foi, de la morale, des moeurs et du droit. L'islam entretient un rapport très particulier au temps qui situe son avenir dans le passé, où un modèle idéal est censé s'être réalisé au cours de la période prophétique.
Le dogme d'un Coran incréé exclut toute historicisation : la loi est valable en tout temps et en tout lieu, l'oeuvre des jurisconsultes se bornant à découvrir dans le Texte la norme qu'ils énoncent. Parce que la théologie rationnelle a très tôt été supplantée par un courant anticolonialiste, la raison autonome et législatrice s'est effacée au profit d'une raison instrumentale dédiée à la seule compréhension du Texte.
L'idée de nation ne s'est pas non plus acclimatée. Manquent dès lors à l'appel les fondements mêmes de la démocratie, le contrat social et ses corollaires, la liberté adjointe à l'égalité. En se mettant à l'abri des évolutions, les sociétés arabes se sont empêchées de construire l'État de droit et d'instaurer la démocratie. C'est en cela que leur État reste inachevé. Sa construction dépendra en grande partie de leur capacité à clarifier leur rapport à la modernité et à redéfinir le statut de leur passé.
Sans doute est-ce là le véritable enjeu des révolutions arabes de 2011.
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L'odysée de l'euro
Edouard Pflimlin, Stephane Kesler
- Gallimard
- Decouvertes Gallimard
- 12 Octobre 1999
- 9782070534524
1999 : naissance de l'euro.
Une première ? pas tout à fait : il y eut, avant lui, les monnaies de rome et celle de l'union latine ; il y eut aussi, en réponse au morcellement monétaire du continent, des systèmes communs, de la lettre de change à l'étalon-or. mais, trop souvent, ils n'étaient que le reflet de la domination d'un pays. avec l'euro, en moins de cinquante ans, l'europe sort de ses divisions et se dote d'une monnaie commune, en renonçant aux monnaies nationales.
Edouard pflimlin retrace cette histoire aux allures d'épopée, oú se mêlent l'aspiration à une paix européenne définitive et la volonté de remédier aux désordres monétaires internationaux. enfin, au-delà des chiffres et des rapports de puissance, il montre, point par point, comment cette odyssée change la vie quotidienne de tous les habitants du vieux continent.
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Expulsions ; brutalité et complexité dans l'économie globale
Saskia Sassen
- Gallimard
- Nrf Essais
- 25 Janvier 2016
- 9782070145706
Expulsions? Entre autres exemples, ce sont neuf millions de familles américaines chassées de leur foyer par la saisie de leur maison suite à la transformation de leur crédit d'accession à la propriété en produits financiers à haut risque; ces millions d'Européens ou d'Américains du Sud exclus de leur travail suite aux plans d'austérité imposés par des institutions internationales; ces millions d'éleveurs ou de cultivateurs expulsés de leurs terres parce que leur État les a vendues à un autre afin que celui-ci puisse développer les productions nécessaires à l'alimentation de ses classes moyennes; ce sont ces gaz à effet de serre que les puissances industrielles et productivistes libèrent à chaque instant ou bien encore ces nappes phréatiques asséchées par les procédés ravageurs d'extraction du gaz de schiste. Nombre de spécialistes, aveuglés par la complexité, verront dans cette énumération des mots en laisse. Faisant fi des frontières comme de nos catégories impuissantes désormais à penser le monde que nous faisons (Nord contre Sud; riches contre pauvres; mauvais usage de la technologie ou pathologies dérivées de la financiarisation affolée de l'économie, etc.), Saskia Sassen montre que derrière cette apparente diversité s'opère une terrible convergence:la violence désormais ordinaire du capitalisme à son stade gobal s'explique par un modèle, un concept - celui d'expulsion. C'est ainsi qu'il convient de nommer la logique qui préside à l'économie globalisée.
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Au coeur de Rungis
Olivier Chartier, Olivier Bauer, Gilles Leimdorfer
- Gallimard Loisirs
- Hors Serie Nouveaux Loisirs
- 22 Octobre 2015
- 9782742438983
Nourrir chaque jour 18 millions de consommateurs. Telle est la mission des anciennes Halles de Paris, installées depuis 1969 à Rungis. 234 hectares, 1200 entreprises, 2,6 millions de tonnes de produits alimentaires traitées, près de 9 milliards d'euros de chiffre d'affaires : Rungis est une incroyable machinerie, parfaitement huilée, où s'échangent les produits qui vont garnir les étals de nos marchés comme les assiettes des grands restaurants. Mais Rungis est aussi une affaire d'hommes et de femmes, de professionnels fiers de leurs métiers et des produits qu'ils défendent. Fruits et légumes, viandes, poissons, plantes et fleurs, fromages, accessoires et décoration, produits d'exception... On trouve toujours tout à Rungis! Entre tradition et modernité, entre défense des variétés anciennes et découverte de nouveaux produits, Rungis s'affirme comme le coeur de la gastronomie française.
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Dictionnaire de l'autre économie
Jean-Louis Laville, Antonio David Cattani
- Gallimard
- Folio Actuel
- 5 Octobre 2006
- 9782070319169
Le libéralisme passe pour le seul modèle possible. Son succès a longtemps laissé dans l'ombre une partie importante de l'économie réelle. Cette prétention est aujourd'hui contestée, en particulier par le mouvement de l'altermondialisation. Mais, loin de se réduire à la seule critique, ce dernier élabore des propositions concrètes afin de promouvoir plus de solidarité et de démocratie. Visant à favoriser cette réflexion sur l'autre économie, ce dictionnaire propose la première synthèse fiable et accessible des connaissances disponibles. Interdisciplinaire autant qu'international, il offre une définition approfondie d'une cinquantaine de termes clés : commerce équitable, développement durable, organisations internationales, service public, droits des femmes... Ces notions s'inscrivent dans l'histoire comme dans l'actualité la plus récente. Outil indispensable pour les acteurs, les chercheurs et les étudiants, cet ouvrage allie une approche théorique à la prise en compte de pratiques sociales jusqu'ici méconnues.
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Violence et ordres sociaux
Douglass c. North, John joseph Wallis, Barry b. Weingast
- Gallimard
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 23 Septembre 2010
- 9782070128563
L'émergence au cours de la dernière décennie de nouveaux pays au rythme de croissance quatre à cinq fois plus rapide que celui de l'Europe au XIXe siècle remet en cause les représentations traditionnelles.
S'attelant à cette question. Douglass C North, John Joseph Wallis et Barry R Weingast soulèvent un coin du voile sur une faille majeure de la pensée occidentale ce n'est pas le progrès économique qui constitue le fondement des sociétés. mais la stabilité de l'ordre social. Selon les auteurs, le principal problème des sociétés humaines est celui de la régulation de la violence en leur sein. La plupart d'entre elles.
Qualifiées d'Etats naturels. endiguent la violence par le biais d'une manipulation politique de l'économie visant à établir rentes et privilèges. Ces privilèges dissuadent certes les individus puissants de recourir à la violence pour accéder au pouvoir ou s'y maintenir, mais ils entravent également le développement. Réintroduisant l'économie politique dans nos grilles de lecture du monde. ce cadre conceptuel inédit permet de comprendre comment les sociétés développées, qui garantissent un accès ouvert aux organisations (partis politiques.
Entreprises. syndicats, médias. ONG, etc.). ont atteint leur niveau politique et économique. Au vu des enjeux actuels du développement, ce cadre rend bien compte de la complexité du processus de décollage économique. que seule une poignée de pays a su enclencher depuis soixante ans.
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«Les accidents monétaires se succèdent. Pourquoi cette crise de confiance ? Jean Lecerf en a suivi l'histoire au jour le jour. Il raconte en termes simples comment elle naquit vers 1960 lorsque se durcissait la guerre froide ; comment la politique de Kennedy et la prospérité même l'amplifièrent ; comment de Gaulle posa brutalement le problème de l'or ; comment «les spéculateurs» dans le contexte de la guerre du Moyen-Orient, de l'escalade au Vietnam et des révoltes étudiantes, firent chuter la livre, fermer le pool de l'or, et s'en prirent à la fois au franc et au mark. Pour conclure, Jean Lecerf explique les solutions présentées et en fait le bilan.»
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Quinze écrivains saluent Nelson Mandela et le combat dont sa vie porte témoignage. Espace laissé libre dans l'approche et ouvert à la plus grande variété des formes, ce livre ne se veut ni cri, ni prise de position de circonstance, mais poèmes (Adonis, Edmond Jabès, Severo Sarduy), fictions (Olympe Bhêly-Quênum, Hélène Cixous, Nadine Gordimer, Mustapha Tlili), essais (Jorge Amado, Maurice Blanchot, Jacques Derrida, Juan Goytisolo, Heiner Müller, Susan Sontag) et théâtre (Kateb Yacine). À les lire, quelque chose aura peut-être changé, comme un approfondissement subtil de la conviction. Alors liberté se prononcera en toutes langues Mandela...
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L'économie morale ; pauvreté, crédit et confiance dans l'Europe préindustrielle
Laurence Fontaine
- Gallimard
- Nrf Essais
- 18 Septembre 2008
- 9782070785773
L'air du temps, chez les économistes, les sociologues, voire les historiens, est à la réflexion : existe-t-il une alternative à cette forme nouvelle d'ensauvagement qu'est devenu le libéralisme économique, pour lequel tout peut désormais s'échanger, y compris la vie, comme des biens ordinaires ?
Réponse la plus courante : le retour à l'économie du don et le développement du microcrédit, observé dans les pays du tiers monde. Aidant les êtres à se désengluer de la misère plutôt qu'à faire fructifier l'argent sur le marché de la spéculation financière, le microcrédit est aujourd'hui paré des atours d'une économie morale, parce que solidaire.
Ces deux formes d'activité économique ont déjà existé dans l'Europe moderne. L'économie, fondée sur la confiance et le crédit, est alors encastrée dans des enjeux sociaux qui la dépassent. Loin de consolider un cloisonnement, le crédit et sa toile embrassent toutes les hiérarchies - groupes sociaux, institutions et régions - dans des dépendances où chacun - les hommes et les femmes selon des modalités spécifiques - se trouve être à la fois prêteur et endetté. Se tissent ainsi des réseaux d'obligations en cascade, donc de pouvoir, dans les espaces géographiques et sociaux les plus variés. La relation de confiance entre créanciers et débiteurs, prêteurs et emprunteurs, constitue un lien social fondamental.
Deux cultures économiques - la féodale et la capitaliste - se côtoient, chacune portée par des valeurs spécifiques, s'affrontent mais également s'influencent au point de se transformer. Restituer le champ des expériences possibles ou communes rend, du même geste, les multiples tensions qui traversent les sociétés : au niveau collectif, entre des sociétés d'ordre et de statut et le développement parallèle de rationalités économiques ; au niveau individuel, entre les exigences contradictoires des diverses appartenances des individus, leurs aspirations et la réalité éprouvée de leur expérience ordinaire.
Des allers-retours entre hier et le plus contemporain, servis par le sens de l'exemple, de l'anecdote et de la narration, Laurence Fontaine en use à la manière de Marc Bloch - comme d'une baguette de sourcier -, pour l'intelligence de la réalité passée, telle qu'elle peut être reconstituée, et la préfiguration utopique d'un univers plus humain.
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L'idéologie de la magistrature ancienne
Jacques Krynen
- Gallimard
- Bibliothèque Des Histoires
- 5 Novembre 2009
- 9782070124978
L'actuel regain de puissance de la justice en France est souvent mis au compte du déclin de la démocratie parlementaire, de l'effacement des valeurs traditionnelles ou encore de la «judiciarisation» des comportements, voire de la complaisance des médias. Or l'emprise de la magistrature sur la marche du pouvoir ne date pas d'hier, explique Jacques Krynen, en historien spécialiste du droit et des idées politiques.
Pour comprendre les raisons de ce phénomène, il entreprend, dans un premier volume, de mettre au jour, à travers l'immense production d'écrits doctrinaux et professionnels du Moyen Âge et de l'Ancien Régime, l'ensemble des savoirs et des convictions qui ont nourri l'action des magistrats.
L'image du pouvoir royal a toujours été associée à l'idéal de justice, idéal dont par l'autorité de leur savoir les juges se sont faits peu à peu les représentants, puis les dépositaires. D'abord auxiliaire, la justice est devenue concurrente du pouvoir politique. En dépit de la réforme des institutions, des formes et des procédures judiciaires sous la Révolution et l'Empire, sa domination n'a fait que croître. Car elle ne se réduit pas à trancher les procès, elle règne aussi sur les valeurs individuelles et collectives, décide en dernier ressort des droits et des libertés réelles et, par tous ces aspects, en impose aux dirigants, quels qu'ils soient.
Le second volume de cette longue histoire, L'Emprise contemporaine des juges, portera sur l'ascension de la justice de la Révolution à nos jours.
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On la dit toute-puissante, mais on la voit parfois désarmée ou dépassée. On la soupçonne de dépendre du pouvoir, mais on évoque le 'gouvernement des juges'. Les responsables politiques s'estiment dépossédés et sont tentés d'intervenir. Le corps judiciaire, profondément renouvelé, est tiraillé entre des exigences contradictoires.
Dans cet essai original, Roger Errera examine avec rigueur les principaux problèmes qui se posent aujourd'hui à la justice. Il mesure aussi le chemin parcouru : depuis un demi-siècle, tout a changé, le métier de juge, ses pouvoirs, son statut, le droit applicable et notre société. Plus que jamais, le juge est dans la cité. La justice est l'affaire de chacun.
Ce livre s'adresse donc aux citoyens, désormais plus exigeants et mieux informés de leurs droits, aux décideurs politiques, rappelés à leurs responsabilités, et aux membres de l'institution judiciaire.
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L'état de justice ; France, XIIIe-XXe siècle Tome 2 ; l'emprise contemporaine des juges
Jacques Krynen
- Gallimard
- Bibliotheque Des Histoires
- 16 Février 2012
- 9782070124985
La justice fait bien plus que trancher les procès, la voici gardienne des valeurs de la République et de la démocratie.
Plus rien ni personne n'échappe à ses interventions, à ses sanctions. Cette emprise de la magistrature sur la marche du pouvoir est un phénomène décelable dès le Moyen Age et qui s'amplifie sous l'Ancien Régime, avait montré Jacques Krynen dans un premier volume. Si elle a été combattue par la réforme des institutions, des formes et des procédures judiciaires sous la Révolution, ce fut sans lendemain, ajoute-t-il dans ce second.
Au XIXe siècle, les juges ont recommencé d'affirmer un savoir et une conscience professionnels non réductibles aux décisions du pouvoir politique. Dans tous les domaines de la vie privée et publique, la France est redevenue, au XXe siècle, sous les auspices de l'" Etat de droit ", l'Etat de justice qu'elle avait été sous la monarchie. Comment et pourquoi en est-elle revenue là ? Comment est-ce compatible avec le dogme démocratique.