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Les chefs-d'oeuvre méconnus de la collection L'Imaginaire
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Une femme de l'aristocratie nippone doit quitter pendant la guerre son hôtel particulier de tokyo pour aller vivre modestement dans un petit chalet de montagne.
Sa fille kazudo, mobilisée, travaille la terre. son fils, naoji, revient de la guerre intoxiqué par la drogue. le frère et la soeur se durcissent contre le malheur des temps et clament leur révolte et leur désespoir.
Tels sont les " gens du soleil couchant " (lancée par osamu dazai, cette expression a fait fortune au japon, au point de qualifier aujourd'hui, jusque dans les dictionnaires, les membres déchus de l'aristocratie) ? en dépit de leur vie inquiète et désordonnée, ils ont gardé les meilleures traditions de leur pays.
A cet égard, le testament de naoji éclaire de façon émouvante son attitude devant la vie et devant le japon. kazudo veut un enfant, et sa foi en la vie force la sympathie, en dépit de ses écarts de conduite, de tout le nihilisme de son comportement et de son langage. elle et son amant sont les " victimes d'une période de transition morale ".
Document de première importance sur l'effondrement d'une société, soleil couchant est aussi - et c'est ce qui donne à l'oeuvre son accent dramatique si personnel - un document sur un homme en qui l'on s'accorde à reconnaître l'un des plus grands écrivains de son pays.
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Fort d'une foi triomphante, un seigneur français entreprend, à la tête d'une troupe de croisés, la chevauchée qui doit le conduire vers la Ville Sainte. Le massacre des Juifs accompagne sa progression, mais bientôt, au sein de paysages désolés, la marche se fait plus lourde et l'esprit plus inquiet. Les malédictions, la mort frappent. Les survivants perdront tout, jusqu'à la pesanteur du corps, pour devenir l'expression d'un pur désir en marche vers une Jérusalem céleste, non plus ville, mais amour absolu.Neuf siècles plus tard, à Tel-Aviv, un vieux conférencier itinérant effectue un autre voyage, au bout de la solitude, de la paranoïa et de l'impuissance.C'est sous le double signe de la mort et de la haine que cheminent ces voyageurs avec lesquels le romancier nous ouvre le cercle vicieux du discours raciste. La haine, chez les chrétiens, engendre l'angoisse; ils chassent le Juif autour d'eux, parmi eux, peut-être même en eux. Chez l'Israélien, elle est l'émanation de l'inquiétude d'un monde où la conscience débouche sur l'absence. Mourir pour Jérusalem. Être un mort-vivant à Tel-Aviv. Deux faces d'une même obsession tragique.
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Le livre des êtres imaginaires
Francoise Rosset, Jorge Luis Borges
- Gallimard
- L'Imaginaire
- 13 Octobre 1987
- 9782070711024
«Le Dragon a le pouvoir de prendre de nombreuses formes, mais celles-ci sont impénétrables. En général on l'imagine avec une tête de cheval, une queue de serpent, de grandes ailes latérales et quatre griffes chacune pourvue de quatre ongles. On parle aussi de ses neuf ressemblances : ses cornes ressemblent à celles du cerf, sa tête à celle du chameau, ses yeux à ceux d'un démon, son cou à celui d'un serpent, son ventre à celui d'un mollusque, ses écailles à celles d'un poisson, ses griffes à celles d'un aigle,la plante de ses pieds à celle du tigre et ses oreilles à celles d'un boeuf. Il y a des spécimens auxquels manquent les oreilles et qui entendent au moyen de leurs cornes. Il est courant de le représenter avec une perle, qui pend à son cou et qui est l'emblème du soleil. Dans cette perle réside son pouvoir. Il devient inoffensif si on la lui enlève.» Ici, le grand auteur argentin nous entraîne dans son bestiaire unique, dans son zoo hors du commun : cent cinquante notices portant sur des êtres de rêve et de cauchemar, créatures présentes dans les contes et les mythologies. Se dégage de ce Livre des êtres imaginaires la patte fantastique et singulière de Jorge Luis Borges.
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Arrachez les bourgeons, tirez sur les enfants
Kenzaburô Oe
- Gallimard
- L'imaginaire
- 9 Février 2012
- 9782070136902
Pendant la Seconde Guerre mondiale, des enfants d'une maison de correction fuient les bombardements et se réfugient dans un village de montagne. Leur éducateur les place sous l'autorité d'un maire convaincu qu'un mauvais enfant doit être supprimé «dès le bourgeon». Le jeune narrateur et son petit frère font partie de ce groupe de délinquants bientôt à la merci des villageois haineux, qui les contraignent à enterrer des animaux victimes d'une épidémie. Quand trois personnes meurent, contaminées, les villageois, pris de panique, abandonnent le village en y enfermant les enfants, qui prennent possession des maisons désertées et esquissent même les règles d'une vie en société. Temps suspendu, unique dans cette histoire de bruit et de fureur, où s'expriment les douceurs de la fraternité et les joies d'un premier amour.Cette impressionnante fable sociale écrite en 1958 appartient à la grande veine de Kenzaburô Oé. Densité, richesse d'analyse, foisonnement de l'imagination, violence, émotion : toutes les qualités du Prix Nobel se trouvent réunies.
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Cristina Campo, qui a peu écrit, déclarait qu'elle aurait voulu écrire encore moins. Livre admirable et d'une rare incandescence, Les impardonnables réunit une part essentielle de son oeuvre. Qu'elle explore les contes de fées, les Mille et Une Nuits, le chant grégorien, l'art du tapis ou qu'elle consacre sa méditation à Chopin, Tchekhov, Proust ou Borges, c'est toujours la même saisissante luminosité qui émane de sa prose. Pour Cristina Campo, la splendeur du style n'était pas un luxe mais une nécessité. Cette «trappiste de la perfection» aspirait à une parole nourricière dont chaque mot aurait été soupesé avec délicatesse. Considérant que notre profondeur d'attention est à la fois «le noyau de toute poésie» et «le seul chemin vers l'inexprimable, la seule voie vers le mystère», elle a su porter son regard plus loin que les décrets du visible. Animé par une passion ardente et une sensibilité subtile, Les impardonnables fait partie des livres impérissables qui sont aussi des livres de vie.
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Franz Kafka connut d'abord Milena comme traductrice : elle établissait la version tchèque de quelques-unes de ses proses courtes. Ces relations se transformèrent en une liaison passionnée dont les lettres permettent de suivre le progrès. Cette passion ne dura qu'un instant, elle tient en quelques mois à peine.Les lettres racontent d'un bout à l'autre ce roman d'amour, orgie de désespoir et de félicité, de mortification et d'humiliation. Car quelle qu'ait pu être la fréquence de leurs rencontres, leurs amours restent essentiellement épistolaires comme celles de Werther ou de Kierkegaard.Milena est morte vingt ans après Kafka, dans le camp de concentration de Ravensbrück.
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«Je n'ai jamais visité d'autres pays que celui de la maladie et dans un sens, c'est une expédition qui vous enrichit davantage qu'un long voyage en Europe. C'est aussi un endroit où il n'y a personne qui puisse vous accompagner.» Qu'aurait pu faire Flannery O'Connor sinon écrire ? À vingt-sept ans, l'écrivaine apprend qu'elle est atteinte d'une maladie incurable qui la prive de toute liberté. Ne lui reste alors que l'écriture pour exister. Dans L'habitude d'être, correspondance au long cours, Flannery O'Connor se dévoile entièrement. Qu'elle s'adresse à sa mère, à ses amis, aux écrivains ou aux lecteurs qui l'entourent, l'autrice établit un autoportrait à la fois farfelu et grave. Avec une franchise angoissée et cocasse, Flannery O'Connor s'affiche sous un jour nouveau. À travers ces lettres, le lecteur découvre tout le processus de création d'une des plus grandes autrices sudistes. Sa voix résonne encore depuis là-bas.
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Sur le conseil de Maxime Gorki de «courir le monde pour acquérir de l'expérience», Isaac Babel, alors apprenti écrivain, s'engage comme correspondant de guerre dans l'Armée rouge durant la guerre soviéto-polonaise de 1920. De mai à septembre 1920, il accompagne la I'armée de cavalerie en Volhynie sous le pseudonyme de Kirill Lioutov. La troupe, commandée par Semion Boudienny, se bat contre les Blancs et les Polonais.
Babel a trouvé dans ces événements vécus l'inspiration des contes de Cavalerie rouge qui font penser aux Désastres de la guerre de Goya : prisonniers fusillés, cadavres accrochés aux arbres, femmes éventrées... La truculence, la passion, le sombre humour de Babel remettent en question la condition humaine.
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«Au fond de ma poitrine, pour la première fois de ma vie, une masse brûlante semblait s'être définitivement ancrée, probablement la conscience du "crime" que j'avais traquée en vain.» Les trois nouvelles rassemblées dans ce recueil appartiennent à la première période littéraire de Kenzaburô Ôé. Situées dans une morgue, une maison de redressement, une famille en décomposition, un lycée et un groupuscule d'extrême droite, elles ont pour protagonistes de jeunes anti-héros confrontés à des situations extrêmes, tantôt métaphoriques, tantôt réalistes, sexuelles, psychologiques ou politiques. Dans ces pages rôde une violence qui prend des formes diverses et brouille les repères mentaux. Publié en 1957, «Le faste des morts» a fait connaître Kenzaburô Ôé, qui n'avait alors que vingt-deux ans et faisait déjà preuve d'une maîtrise surprenante. À ce titre ce texte est resté comme un jalon essentiel de la carrière de l'auteur. «Le Ramier» et surtout «Seventeen» s'inscrivent dans ce même mouvement de fondement de l'oeuvre du futur Prix Nobel.
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«Il y a dans ce livre deux textes simplement alternés ; il pourrait presque sembler qu'ils n'ont rien en commun, mais ils sont pourtant inextricablement enchevêtrés, comme si aucun des deux ne pouvait exister seul, comme si de leur rencontre seule, de cette lumière lointaine qu'ils jettent l'un sur l'autre, pouvait se révéler ce qui n'est jamais tout à fait dit dans l'un, jamais tout à fait dit dans l'autre, mais seulement dans leur fragile intersection.L'un de ces textes appartient tout entier à l'imaginaire : c'est un roman d'aventures, la reconstitution, arbitraire mais minutieuse, d'un fantasme enfantin évoquant une cité régie par l'idéal olympique. L'autre texte est une autobiographie : le récit fragmentaire d'une vie d'enfant pendant la guerre, un récit pauvre d'exploits et de souvenirs, fait de bribes éparses, d'absences, d'oublis, de doutes, d'hypothèses, d'anecdotes maigres. Le récit d'aventures, à côté, a quelque chose de grandiose, ou peut-être de suspect. Car il commence par raconter une histoire et, d'un seul coup, se lance dans une autre : dans cette rupture, cette cassure qui suspend le récit autour d'on ne sait quelle attente, se trouve le lieu initial d'où est sorti ce livre, ces points de suspension auxquels se sont accrochés les fils rompus de l'enfance et la trame de l'écriture.»Georges Perec.
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«Légendes saisies en vol, fables ou apologues, ces Nouvelles Orientales forment un édifice à part dans l'oeuvre de Marguerite Yourcenar, précieux comme une chapelle dans un vaste palais. Le réel s'y fait changeant, le rêve et le mythe y parlent un langage à chaque fois nouveau, et si le désir, la passion y brûlent souvent d'une ardeur brutale, presque inattendue, c'est peut-être qu'ils trouvent dans l'admirable économie de ces brefs récits le contraste idéal et nécessaire à leur soudain flamboiement.»Matthieu Galey.
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Si je t'oublie, Jérusalem
William Faulkner, Maurice-Edgar Coindreau
- Gallimard
- L'imaginaire
- 20 Juin 2001
- 9782070761944
C'est le roman de Faulkner où la souffrance atteint peut-être sa plus grande intensité : l'histoire tragique des deux amants est l'une des plus douloureuses qu'il ait écrites, et la mort de Charlotte Rittenmeyer, « le personnage féminin le plus déchirant de Faulkner », devient un récit poignant...
Le titre est tiré d'un psaume qui rappelle la captivité des Juifs à Babylone. Ce thème de la captivité, de la privation de liberté, littérale ou métaphorique, est central dans le roman.
Traduction révisée par François Pitavy. Préface et notes de François Pitavy.
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Esther Greenwood, dix-neuf ans, est à New York avec d'autres lauréates d'un concours de poésie organisé par un magazine de mode. De réceptions en soirées passées pour tuer le temps, ce sont quelques jours d'une existence agitée et futile que vit la narratrice. En même temps, elle se souvient de son enfance, de son adolescence d'étudiante américaine, des amours qu'elle a connues. Tout bascule lorsque Esther quitte New York. Tentatives de suicide, traitements de choc, guérison, rechutes, et, pour finir, l'espoir. Esther est à la fois «patiente» dans l'univers hospitalier et observatrice au regard aigu de ce monde, qui a pour toile de fond l'Amérique des années 1950.
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De mémoire de vieux marin, aucun bateau n'avait essuyé pareille tempête. À bord du Narcisse, entre Bombay et l'Angleterre, sont réunis, sous les ordres du capitaine Allistoun et de son second Baker, le vieux Singleton, l'impétueux Craik, Donkin, un marin douteux, et James Wait, seul homme noir de l'équipage, dont on peine à savoir s'il est vraiment malade. Face à la mer monstrueuse, le temps semble s'être arrêté, l'ambiance est délétère. À court d'eau et de vivres, ils doivent composer avec les remous des coeurs blessés : pitié, compassion, peur, ressentiment et haine profonde traversent l'équipage, jusqu'à lui faire frôler la mutinerie. Dans ce roman de 1897, étude fascinante de personnages placés sous tension, Joseph Conrad dépeint toute la profondeur de l'âme humaine. La longue expérience de l'auteur dans la marine marchande et la finesse de sa plume font la richesse de ce grand roman d'aventures. Initialement connu sous le titre Le Nègre du «Narcisse», ce texte est publié par «L'Imaginaire» sous le titre Les Enfants de la mer. Un avertissement détaille les raisons de ce choix.
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Dans ce récit d'une rare sincérité, Georges Navel (1904-1993) raconte sa vie. C'est celle d'un enfant d'ouvriers, né au début du siècle, et qui s'élève par ses propres forces, à travers maintes aventures, à la connaissance du monde, de la société et de soi-même. Son enfance, avant et pendant la guerre de 1914, ses apprentissages, ses vaines tentatives pour adhérer de toute son âme à un parti politique qui satisfasse ses aspirations, son non-conformisme, notamment en matière de service militaire, sa participation à la guerre civile espagnole, sa mobilisation en 1939, son installation dernière comme fermier dans le Midi forment autant de tableaux d'une sobriété, d'une pudeur et d'une franchise exceptionnelles. En même temps c'est la découverte des véritables nourritures terrestres, de la joie de vivre, d'exercer ses muscles, de nager et de dormir, mais aussi de manier la pelle, la pioche ou la lime. La sagesse, un peu teintée de résignation, à quoi l'auteur atteint au terme de son livre (en 1943) n'est pas celle qu'inspire une vue métaphysique de l'homme et du monde mais celle qu'enseignent «une existence lourde d'expérience, un itinéraire spirituel singulièrement âpre et vivant».
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Le narrateur, séparé de sa femme, vit seul avec son jeune enfant, en Allemagne d'abord, puis à Paris où ont lieu les premiers contacts avec l'école et la «langue étrangère». Pour eux, la vie quotidienne, nourrie d'aspiration au bonheur et de violence contenue, s'avère, par tâtonnements, un long apprentissage réciproque. Elle prend pourtant figure d'épopée sous la plume tendre et grave de Peter Handke, qui décrit ici ce que l'on élude habituellement : de menus faits, certes, mais d'une exceptionnelle grandeur.
«Ce qui est raconté ici, c'est l'histoire fondatrice de la vie individuelle, ce qui donne son sens aux choses car cette histoire d'enfant est engagée au plus profond de l'histoire, non seulement de l'homme qui la raconte, mais de notre époque tout entière.» Georges-Arthur Goldschmidt.
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«Ils parlent. Ils tapent sur la table. Ils reniflent. Ils se grattent dans les poils. Ils se grattent la tête. Ils se renversent sur leurs chaises. Ils mettent leurs pouces dans leurs bretelles. Ils font semblant, mais ils ne sont pas bien. Ils griffent de l'ongle le bois de la table. Ils parlent. Ils se comprennent. Et pourtant, c'est quoi 14, c'est quoi l'Armistice, c'est quoi Daladier, c'est quoi les Boches, c'est quoi Hitler, c'est quoi la politique, c'est quoi le Taureau du Vaucluse, c'est quoi Chamberlain, c'est quoi le pape, c'est quoi la guerre?- C'est quoi, la guerre?- Occupe-toi de ta soupe. Mange.»Pendant l'Occupation, Louis Calaferte a onze ans. Il raconte la guerre telle que la vit un enfant, au jour le jour. Lorsque l'on sort à peine de l'enfance, comment comprendre ce que sont l'exode, la Gestapo, les trahisons, la déportation, les arrestations, le marché noir? Peut-être faut-il simplement écrire les choses comme elles viennent sans laisser passer aucun détail.Sans temps mort, dans une langue incisive, Calaferte a écrit un récit de guerre dont on ne ressort pas indemne.