Kamel Daoud, prix Goncourt 2024
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«Je suis la véritable trace, le plus solide des indices attestant de tout ce que nous avons vécu en dix ans en Algérie. Je cache l'histoire d'une guerre entière, inscrite sur ma peau depuis que je suis enfant.» Aube est une jeune Algérienne qui doit se souvenir de la guerre d'indépendance, qu'elle n'a pas vécue, et oublier la guerre civile des années 1990, qu'elle a elle-même traversée. Sa tragédie est marquée sur son corps : une cicatrice au cou et des cordes vocales détruites. Muette, elle rêve de retrouver sa voix. Son histoire, elle ne peut la raconter qu'à la fille qu'elle porte dans son ventre. Mais a-t-elle le droit de garder cette enfant ? Peut-on donner la vie quand on vous l'a presque arrachée ? Dans un pays qui a voté des lois pour punir quiconque évoque la guerre civile, Aube décide de se rendre dans son village natal, où tout a débuté, et où les morts lui répondront peut-être.
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«Un certain goût pour la paresse s'installe chez le meurtrier impuni. Mais quelque chose d'irréparable aussi : le crime compromet pour toujours l'amour et la possibilité d'aimer. J'ai tué et, depuis, la vie n'est plus sacrée à mes yeux. Dès lors, le corps de chaque femme que j'ai rencontrée perdait très vite sa sensualité, sa possibilité de m'offrir l'illusion de l'absolu. À chaque élan du désir, je savais que le vivant ne reposait sur rien de dur. Je pouvais le supprimer avec une telle facilité que je ne pouvais l'adorer - ç'aurait été me leurrer. J'avais refroidi tous les corps de l'humanité en en tuant un seul. D'ailleurs, mon cher ami, le seul verset du Coran qui résonne en moi est bien celui-ci : "Si vous tuez une seule âme, c'est comme si vous aviez tué l'humanité entière."»
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Orphelin de mère, mis à l'écart par son père, il a grandi dans la compagnie des livres qui lui ont offert une nouvelle langue. Depuis toujours, il est convaincu d'avoir un don : s'il écrit, il repousse la mort ; celui qu'il enferme dans les phrases de ses cahiers gagne du temps de vie. Telle une Schéhérazade sauvant ses semblables, il expérimente nuit après nuit la folle puissance de l'imaginaire. Fable, parabole, confession, le deuxième roman de Kamel Daoud rend hommage à la nécessité de la fiction et à l'insolente liberté d'une langue choisie.
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Invité à passer une nuit dans le musée Picasso, alors qu'y était présentée l'exposition «Picasso 1932, année érotique», Kamel Daoud en a tiré un récit dans lequel il confronte les représentations que peuvent avoir du corps, du désir, de la nudité, de l'amour, du plaisir ou de la liberté, un artiste et un djihadiste. L'art peut-il guérir un homme de la violence, lui redonner le désir du monde ?
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Des printemps arabes aux attentats de Paris, Bamako et Tunis, des élections présidentielles algériennes à la crise des réfugiés, cette sélection de chroniques de Kamel Daoud publiées pendant six années donne à entendre une voix libre, puissante et provocante dont l'audience ne cesse de s'étendre dans le monde.
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Son oeil dans ma main : Algérie 1961-2019
Raymond Depardon, Kamel Daoud
- Images Plurielles
- 4 Février 2022
- 9782919436514
Qu'est-ce que je ressens, moi, décolonisé, quand je contemple une photo de cette époque, de ce passé qui, sur injonction, a été décrété contemporain-pour-toujours ? Qui suis-je dans ce miroir qui devrait me refléter, et qui cependant m'efface pour toujours au présent ?
Il me faut scruter les détails, objets, silhouettes, bosquets, magasins, automobiles, qui peuplent l'arrière-plan ; les ombres aussi. Je tente d'aileurs de faire irruption dans celui-ci. Je m'imagine réincarné en 1961 : debout dans un angle mort, penché à une fenêtre, traînant dans une rue d'Alger, jetant un regard anxieux sur une « roumia », crapahutant sur la colline pelée... J'invente ma propre possibilité de vivant à cette époque.
Raymond Depardon photographie ce qu'il voit à la jonction de ce qu'il ne voit pas. Je regarde ce que je ne vois pas, en croyant savoir ce que cela signifie. Son oeil dans ma main. Son corps est ma mémoire.
Ce qui m'intéresse chez le photographe, c'est son corps, son errance, son voyage : je me glisse en lui, j'épouse ses mouvements, son regard, sa culture, ses préjugés peut-être, mais aussi sa singularité. Errance de déclic en déclic.
Je deviens une monstrueuse et fascinante coïncidence. Une possibilité, même brève et limitée, d'omniscience.
Ne devrais-je pas, alors, éprouver un sentiment proche de la frayeur ?
En parcourant ces photos, arraché à mon millénaire, transporté vers un autre, je pourrais tressaillir violemment. Je pourrais hurler à la possession - hurler d'effroi et de gratitude.
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La préface du nègre ; le Minotaure 504 et autres nouvelles
Kamel Daoud
- Actes Sud
- Babel
- 18 Février 2015
- 9782330039462
Un chauffeur de taxi profite de la disponibilité forcée de son passager pour lui confier sa détestation d'Alger au long d'une logorrhée hallucinée. Un militaire expose à la Foire internationale un prototype d'avion qu'il a conçu seul ou presque dans le désert, oeuvre de toute une vie, mais auquel les habitants de la capitale ne s'intéressent pas. Un marathonien à bout de souffle court sans fin, laissant divaguer ses pensées, dans le stade des Jeux olympiques d'Athènes. Un écrivain embauché pour faire un travail de nègre se rebelle et outrepasse son rôle. Un Arabe imaginaire s'identifie au sauvage, au nègre, à Vendredi, cherchant dans ces figures inventées par l'Occidental/le Blanc la place censée être la sienne.